Nomades et charte africaine

droits de l'homme

NOMADES & CHARTE AFRICAINE DES DROITS

Les éleveurs nomades peuls et touaregs et leurs droits

Le principal instrument africain relatif aux droits humains est la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine). Elle est parfois aussi appelé Charte de Banjul car elle a été signée à Banjul, en Gambie.

La Charte africaine a été signée par 53 pays africains. La Charte reconnaît trois catégories de droits : les droits civils et politiques, les droits sociaux et économiques et les droits collectifs.

La Charte africaine est un instrument novateur de protection des droits humains. Elle est la plus complète sur le plan de la reconnaissance des principes d’universalité, d’indivisibilité et d’interdépendance des droits humains.

En vertu de la Charte africaine, les droits civils et politiques, les droits sociaux et économiques, ainsi que les droits collectifs, se voient conférer la même force.

Selon la Charte, toute personne a de nombreux droits individuels, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

On peut citer les droits à la vie, à la nourriture, à l’eau potable ; les droits de s’exprimer librement, d’adhérer au syndicat ou au parti politique de son choix.

Les peuples aussi ont des droits inscrits dans la Charte, comme le droit à l’autodétermination et le droit de disposer librement de ses ressources et richesses naturelles.

Les États sont tenus de promouvoir et de protéger toutes les catégories de droits.

Les peuples autochtones en Afrique et leurs droits

La Commission africaine a reconnu que des peuples autochtones existent en Afrique. Ils subissent de graves violations de leurs droits humains et la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples (Charte africaine) est un instrument important pour la protection de leurs droits.

Afin de tirer parti de ces progrès, les peuples autochtones doivent cependant renforcer leur capacité à se saisir de ces instruments africains relatifs aux droits humains, en vue de transformer leur contexte social, politique et économique.

Les peuples autochtones d’Afrique font face à des difficultés de mise en œuvre de leurs droits. Ces difficultés sont essentiellement liées à la définition du concept de «peuples autochtones » lui-même, ainsi qu’à l’accès à la justice.

La conception individualiste des droits de l’homme, et ce malgré la reconnaissance des droits des peuples dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981, complique la reconnaissance des droits des peuples autochtones au niveau des États.

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, étant un organe de recours en cas de violations des droits de l’homme par les États, a réaffirmé le caractère obligatoire des instruments internationaux de protection des droits des peuples autochtones.

Rappelant l’aspect collectif de ces droits et en reconnaissant les droits à la terre et aux ressources naturelles, la Commission a fait un lien direct entre reconnaissance des droits des peuples autochtones et protection de l’environnement.

Dans ce cadre, la consécration du principe de consentement libre, préalable et éclairé et du principe d’étude d’impact environnemental avant l’exécution d’un projet de développement sur les terres ancestrales des peuples autochtones s’avère être un moyen de confirmer le rôle incontournable des peuples autochtones dans la protection de l’environnement.

Les nomades, peuples autochtones ? Protection de l’environnement

Le mouvement autochtone

À la fin des années 1990, les populations qui s’identifiaient comme peuples autochtones étaient plus ou moins celles qui vivaient de la chasse et de la cueillette et celles qui vivaient du pastoralisme nomade ou transhumant.

C’était là les caractéristiques acceptées par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.

La mobilisation des peuples autochtones évolue autour des questions identitaires, de population avec des économies non agricoles, dans des zones écologiques très contraignantes, déserts, zones semi arides, zones montagneuses.

C’est un mouvement initié par ceux qui ont été écartés par le système colonial et gardés à l’écart par les nouveaux gouvernements, y compris démocratiques de la période d’indépendance en Afrique.

Ces populations veulent trouver une nouvelle manière d’aborder la question de l’intégration nationale sans perte d’identité, de langue ou de territoire. Le mouvement autochtone en Afrique est une revendication à la fois culturelle et territoriale.

L’autochtonie n’est pas une identité essentielle, c’est une revendication, on la milite. C’est l’exemple des Touaregs, qui ont dû cesser de faire de l’élevage nomade et qui se sont retrouvés à Tombouctou ou à Agadez sans emploi.

Ils ont continué à revendiquer cette identité touarègue et leur pastoralisme, même s’ils avaient perdu leur économie, moyen d’existence et emploi en tant qu’éleveurs nomades ou transhumants.

Les organisations représentant les peuples autochtones ont explicitement refusé qu’y soit établie une définition de ce qu’ils étaient. « The right to define what is an indigenous person be reserved for the indigenous peoples themselves. Under no circumstances should we let artificial definition (…) tell us who we are ».

Les peuples autochtones ne demandent donc rien d’autres que d’être les principaux acteurs de leur propre construction sociale.

Les nomades peuls et touaregs : des écologistes reconnus

Le mode de vie pastoral est en symbiose avec les écosystèmes dont les peuples nomades dépendent et dont ils prennent soin mais qui les expose tout particulièrement aux conséquences du changement climatique.

Les pasteurs nomades contribuent à protéger la biodiversité des zones arides et semi arides. Et ils ont un rôle crucial dans l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques.

Le rôle des autochtones est désormais reconnu au plus haut niveau, par l’Accord de Paris, dans la déclaration de New-York sur les forêts mais aussi par les récents rapports du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sur les océans et le rôle des terres.

Les droits des peuples : articles 20, 21 et 22

Ils sont consacrés dans les articles 20 et 21 ; le premier traite du droit des peuples africains à l’existence et à l’autodétermination politique et le second, de leur droit à la libre disposition de leurs ressources naturelles.

Selon la Charte, tous les peuples ont des droits économiques. Ils ont le droit de s’opposer à l’exploitation par des étrangers des richesses et ressources naturelles de leur pays.

Ils ont aussi le droit d’utiliser leurs richesses dans l’intérêt de la population tout entière et pour renforcer l’unité africaine.

Par exemple, la Charte donne aux peuples le droit de conclure des accords commerciaux visant à protéger et à développer leurs ressources naturelles.

Les droits des peuples ou droits collectifs prévus aux articles 19 à 24 de la Charte incluent :

– le droit à l’égalité et à ne pas être dominés par d’autres peuples (article 19) ;

– le droit à l’existence et à l’autodétermination (article 20) ;

– le droit à la libre disposition de leurs richesses naturelles (article 21) ;

– le droit au développement économique, social et culturel (article 22) ;

– le droit à un environnement satisfaisant, propice à leur développement (article 24).

La Commission africaine a précisé que les droits des peuples tels que visés par la Charte ne peuvent pas être exercés en violation du principe de l’intégrité territoriale des États indépendants existants.

Ce qui signifie que le droit à l’auto-détermination ne peut pas être utilisé pour justifier une sécession d’avec un État indépendant et doit être exercé dans l’enceinte des frontières du pays.

Pour les peuples autochtones, les droits collectifs de la Charte ainsi que le droit de propriété de l’article 14 – considérés séparément ou ensemble – indiquent une obligation de la part des États membres :

  • de respecter et de protéger le droit à la propriété, au contrôle, à l’utilisation et à la jouissance des ressources, terres et territoires ancestraux des peuples autochtones.

En effet, la Commission africaine a noté que « la protection des droits à la terre et aux ressources naturelles est fondamentale pour la survie des communautés autochtones en Afrique et elle est prévue aux articles 20, 21, 22 et 24 de la Charte africaine. »

Cette remarque est conforme aux décisions et commentaires de plusieurs mécanismes des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones sur leurs terres ancestrales.