Le processus de mondialisation imposé par les Etats à travers le modèle néolibéral met en danger la vie et la culture propre des peuples nomades. C’est le cas notamment des populations touarègues. La mondialisation leur nie aujourd’hui le droit à la terre pour donner priorité aux intérêts des grandes sociétés transnationales.
Si la mondialisation permet le rapprochement et l’épanouissement des hommes dans certains pays du monde, dans d’autres elle est facteur d’isolement et de destruction. Le spectacle auquel assiste aujourd’hui la population locale impuissante est désolant.
Impuissants devant cet envahissement, les éleveurs touaregs s’interrogent sur leur avenir immédiat, celui de leurs terres, celui de leurs troupeaux et de leur environnement.
Pour les Touaregs, comme pour tous les peuples autochtones, la terre est le fondement de la vie et de la culture. L’absence de droits et d’accès à leurs terres ou aux ressources naturelles mine leur capacité à déterminer eux-mêmes leur développement et leur avenir.
Le système pastoral : une richesse dilapidée
Le pastoralisme mobile est le système le plus viable d’utilisation des terres pour les milieux arides sur la planète, mais sa valeur directe tient souvent au lait et à la fibre plutôt qu’à la viande.
Les pasteurs du monde sont les gestionnaires avertis des environnements complexes, avec une propension à survivre et à s’adapter.
Les perceptions négatives sur les économies pastorales ont sapé la résistance des pasteurs, réduit leur capacité d’adaptation, fragilisé leurs moyens d’existence, et conduit à la dégradation de leurs ressources de base.
Les efforts pour « moderniser » les pasteurs à travers une promotion agressive de la sédentarisation, de l’agriculture, et d’une éducation inadéquate, ont eu des effets pervers qui ont abouti à l’accroissement de la vulnérabilité et de la pauvreté.
La réduction de la durabilité de la production pastorale a placé les pasteurs en situation de marginalisation et de désavantage au plan économique.
Comprendre ce qu’est le système pastoral
Le pastoralisme est une adaptation aux environnements marginalisés.
Dans ces environnements, le seul système de gestion le plus approprié est le système qui consiste à aller là où sont les ressources, et les exploiter lorsqu’elles sont disponibles.
Il est de plus en plus reconnu que la production mobile du bétail est vitale pour la santé de l’écosystème des milieux arides, et nombre de pâturages dépendent du pacage.
La dégradation des pâturages se perçoit autour des campements, points d’eau, et marchés où le bétail converge.
Mais dans les pâturages où la mobilité connaît moins de contraintes, en particulier là où les institutions coutumières peuvent assumer leurs responsabilités en matière de gestion, cette dégradation est moindre.
Une modernisation inadaptée du système pastoral
Cependant, de nombreux systèmes de pâturage ont été fragilisés sur la base de la perception du pastoralisme comme étant archaïque et économiquement irrationnel, et ayant besoin d’être modernisé ou remplacé.
Les systèmes de production mis en exergue comme étant des alternatives « modernes » au pastoralisme se sont avérés moins productifs et plus néfastes à l’environnement.
En rejetant le pastoralisme comme étant improductif, les planificateurs du développement ont investi les maigres ressources dans des systèmes alternatifs qui sont moins viables économiquement et moins durables au plan de l’environnement.
Les enjeux du pastoralisme en milieux arides
Sur le plan économique, le pastoralisme fait mieux que toute autre système d’utilisation des terres dans les milieux arides, et au niveau écologique, il est tout simplement indispensable.
Cependant, les défis de développement auxquels est confrontée l’Afrique, faiblesse des infrastructures, faiblesse du niveau d’adoption des technologies de production sont amplifiés dans les milieux arides où vivent les pasteurs.
Dans les pays où prédominent les milieux arides, les Objectifs de Développement Durables ne peuvent être atteints si les besoins spécifiques des pasteurs ne sont pas satisfaits.
Les pasteurs des pays en développement se retrouvent en risque de se voir confisquer leurs terres, d’être exclus des prises de décision, et d’être de plus en plus incapables d’éviter la pauvreté.
Le système pastoral, un mode de vie
Un aspect à prendre en compte est que le pastoralisme relève d’un système de vie.
En effet, la mobilité, en tant que mouvement dans un environnement hostile est source de valorisation sociale et vue comme un fait nécessaire indispensable à la survie du groupe.
Dans son rapport direct au milieu naturel, le pasteur se confronte à un certain nombre de risques, dont les risques sanitaires du bétail, les risques liés à la prédation par les fauves, les risques liés aux contraventions résultantes des infractions et les risques de conflits avec les agriculteurs.
Au plan écologique, la mobilité est assimilée à un phénomène historique dans les zones arides et semi-arides réputées difficiles ou pauvres en ressources pastorales.
Dans ces milieux en « équilibre instable» où les ressources sont dispersées, la mobilité est une stratégie opportuniste d’exploitation de la diversité et de la variabilité de l’offre en ressource en relation avec la diversité écologique.
Loin donc de traduire seulement des stratégies de survivance, la mobilité consisterait en un véritable « programme de nutrition » centré sur des objectifs à atteindre.
L’un des reproches majeurs faits aux peuples pasteurs, c’est de manquer de rationalité économique.
Or, cette rationalité existe, mais elle n’est pas orientée vers le marché, elle combine des biens privés (bétail) avec des ressources publiques (les pâturages) et réside dans la capacité des systèmes pastoraux à s’appuyer sur la mobilité.